J'attendais avec impatience le moment d'aller voir "Le Grand Soir" de Delépine & Kervern depuis que je savais qu'ils avaient enfin décidé de faire tourner Albert Dupontel, le Bernie de mon cœur !
Je le leur avais suggéré, si j'ose dire, lors du tournage de Mamouth au Maki, mais ils m'avaient dit: "bof... chacun fait ce qu'y veut d'son côté..., lui du sien, nous du nôtre." dans ce style qui leur est si cher.
Moi je leur avais redit: c'est bien dommage, parce que vous pourriez apporter autre chose en plus à ses films, de différent à ses scénarios un peu légers, comme "Enfermé dehors" qui se termine en reportage chez l'abbé Pierre...
Je tiens à prévenir qu'en partant au ciné, j'avais pas mis toutes les chances de mon côté: j'avais emmené ma boule, ma chère, ma grosse, mon habituelle et fidèle compagne, celle de l'ancien temps, celle qui me tient bien au corps et au cœur, qui pèse, qui me lâche jamais quand tout va mal mais pourrait aller mieux...
Cela n'empêche ... le film m'a déçu !!! Je m'attendais à tout autre chose, à une démesure provocante et salutaire que le talent de Dupontel aurait permis si on lui en avait offert la possibilité, si l'histoire avait été à sa hauteur !
Rien de tout ça... Rien de plus que l'excellent Poelvoorde en punk souffreteux dont aucun détail de son revêtement cutané ne nous a été épargné. Des mouvements grossissants et brutaux de l'objectif d'une caméra utilisée comme un jouet et pas comme un outil. Des coupes réalisées à la hache n'amenant aucune pression narrative juste un dispersement de l'attention du spectateur balloté de plans en plans sans véritable fil conducteur... Du flou partout dans l'image.
Je ne sais pas ce qu'ils cherchent en fait dans leur technique narrative, dans leur cinéma marginal mais pas tout à fait, lorsqu'ils réécrivent au jour le jour les scènes de leur improbable scénario qui bien entendu n'en est pas un, ou alors très sommaire...
Benoit Delépine s'en vante un peu... à mon avis il ne devrait pas!
Je n'ai pas saisi le côté contestaire de la société de consommation, disons que pour moi les vrais arguments de la contestation sont un peu absents comme la notion du "pouvoir dépenser" en lieu et place de celle du pouvoir d'achat manipulée par les marchands depuis longtemps, cette notion qui amène les gens à toujours éxagérer leurs achats de produits de plus en plus indigents, cette spirale qui pousse ces mêmes gens vers leur appauvrissement généralisé comme on le constate aujourd'hui dans les licenciements et la montée inexorable du chômage.
C'est sans compter aussi sur l'icône moisie Wampa, chanteur visionnaire et révolutionnaire portant son message au plus haut de sa crête de vieux, rien qu'en faisant du bruit et en incitant son public à crier "fuck" et tout et tout...
Sur un plan artistique cette méthode de filmer n'amène rien de révolutionnaire au genre, au contraire, elle l'affadit. Les grands créateurs savaient adapter leur génie à la projection cinématographique, au spectacle et c'est cela qui a fait leur succès et c'est ça que les Grolandais ne savent pas faire. Si les deux compères continuent ainsi, sans rigueur, j'ai peur qu'ils perdent tout l'acquis de leurs premiers films qui les avaient rendus sympathiques au public.
Mais comme nous l'a annoncé Delépine, leur prochaine réalisation étant financée d'avance, ils ne risqueront par leurs sous en faisant un bide.
Donc aucune intensité dramatique dans ce film qui se termine en une giclée de jus de boudin qu'on ne voit pas arriver. Parait qu'une première version foutait le feu... Celle-ci m'a juste donné l'envie de sortir sans alerter les pompiers.
Areski est très bien, la mémère Fontaine qui m'emmerde avant tout quand elle chante, m'a ici surtout laissé froid. J'chuis pas supporter, ni admirateur.
Je sais bien que là j'ai tort: quand tout le monde s'esbaudit sur la vieille qui parle avec le pèle-patate dans la bouche, moi faut que je fasse mon chieur, mon qu'est jamais content, mon qu'est jamais comme les autres...
Je suis fait ainsi... que voulez-vous.
Différentes vues (d'esprit) du vrai Grand Soir, pour alimenter la diversité: