Ce Printemps, dans la pépinière, la seule plante couverte de fruits est la groseille ERDE, une de mes protégées...
C'est dire ses qualités! Surtout de voir cela sur des jeunes plants, s'étant peu développés l'an passé, n'étant pas destinés à produire si tôt et n'ayant pas l'aura des variétés dont on parle...
Et pourtant...
La première grande gloire des défuntes pépinières FRUIROSE, fut de commercialiser deux cassissiers autofertiles à forte production de grande qualité qui déménagèrent de force toutes les plus anciennes variétés répandues dans le commerce, comme quoi la nouveauté a du bon, cela dépendant surtout de la demande du public. Il n'y a en matière de variétés horticoles, aucun choix imposé, rien que des désirs exhaussés, contrairement aux idées reçues.
Le succès des cassis TENAH & TSEMA tint avant tout de la résolution d'un besoin plus ou moins clairement exprimé, et non d'un dictat imposé par une grosse compagnie commerciale, puisqu'à l'origine FRUIROSE était née dans le jardin d'un retraité fortuné et simple amateur entre Fécamp et Dieppe, que mon père en recherche de plants de petits fruitiers avait remarqué faisant de la publicité dans une revue de jardinage!!!
Ce retraité de la Schell (et oui!) s'appelait HANET et l'on choisit l'anagramme TENAH pour baptiser le premier des nominés et TSEMA pour le second, consécration et reconnaissance pour son découvreur sélectionneur hollandais , le Dr RIETSEMA!
L'association FRUIROSE, née un peu à la demande de Georges HANET qui voulait bien donner son œuvre mais seulement à des agriculteurs et non à une société commerçante, qui regroupait donc 3 petites coopératives naissantes devint obtentrice de ces deux variétés de cassissiers et déposa une licence de protection variétale(COV).
Mon père en était l'animateur principal, Hanet le président honoraire et c'est ainsi que les deux compères rendirent un jour visite au Dr Rietsema peu de temps avant qu'il ne cesse ses activités captivantes de croisement, hybridation et sélection variétale de petits fruits divers. Et c'est là, dans ce jardin d'inconnues, que le vieux docteur offrit à ses visiteurs de choisir et garder pour eux une de ses sélections non répertoriée dont ils seraient alors les uniques possesseurs!
Mon père revint de Hollande tout content de lui avec ce petit bijou de groseillier et surtout très fier de l'avoir raflé sous l'œil (il était borgne) et à la barbe, qu'il n'avait pas, du hautain et un peu vorace Mr Hanet.
Mais voilà, mon géniteur n'avait pas la fibre "créatrice" et ne sut jamais exploiter les qualités de la groseille et c'est moi, plus tard, après l'avoir baptisée de ses initiales: ERDE = René Duret, qui entrepris de la faire connaitre et qui pris en même temps une licence de détenteur, une démarche encore restée simple en cette époque pour un petit producteur, et à sa portée surtout !
Mais il n'y a pas de véritable marché en France pour les groseilliers...
Donc cela resta dans cet ordre-là pendant une petite vingtaine d'années jusqu'au jour où, n'ayant pas voulu renouveler mon droit de licence, je reçus de la part d'un organisme dont le nom m'échappe encore, du genre contrôle des espèces cultivées, l'avis que ma variété ERDE allait être retirée du catalogue officiel des variétés cultivées de france et ce sans aucune explication sauf que cette sentence avait été recquise lors de la dernière réunion de ce fameux groupe!
Et pour quelles raisons ? Pas d'indication! Pareil qu'une lettre de cachet: ce déni de justice que 1989 et la république ont combattu et aboli !
Il n'y a pas de marché conséquent, donc on ne peut accuser un groupe concurrent de pressions, les catalogues de pépiniéristes sont pauvres, alors pourquoi les appauvrir encore ???
C'est à la lumière des déboires récents de l'association Kokopelli que l'on peut trouver une réponse: ce fameux catalogue officiel créé à l'origine (sous Vichy!) pour épurer le marché des semences céréalières et des plants de vignes afin d'offrir au producteur une sécurité lors de ses semis ou plantations ( on trouvait tout et n'importe quoi à l'époque) fut conçu comme une contrainte par certains malades de l'autorité et de la bien pensance qui l'étendirent à toutes les productions végétales sans exception et surtout qui s'en servirent pour combler leurs propres lacunes! Car plutôt que d'essayer d'aider à offrir un produit parfaitement identifiable en entretenant un conservatoire, décidèrent de limiter l'accès à la diversité en privant de petites spécialités de droit de citer.
Cet organisme cité plus haut est revenu à la charge, mais sur la pointe des pieds, me demandant de lui envoyer mon catalogue tous les ans! Pour être livré à sa censure !!!
Pire même, ils m'ont demandé pour conserver d'anciennes variétés à l'inscription chez eux et ainsi pérenniser leur sale manie, de m'en faire comme le tuteur en m'engageant à conserver chez moi un champ de chaque variété, demande à laquelle je n'ai pas répondu!
Mais qu'attendent-ils donc pour le faire eux-mêmes ? C'est leur boulot, non ? A partir de là, ils seraient capables de fournir des boutures à tout pépiniériste leur en faisant la demande plutôt que d'avoir recours à l'interdit !!! Nous changerions de morale à ce compte-là, ce serait même révolutionnaire pour notre société!
En fin de compte, ce boulot c'est moi qui le fais par conviction personnelle, sans subventions d'état, juste pour le plaisir d'entretenir de la diversité!
N'est-ce pas mieux comme ci-dessus de voir cohabiter la Gloire des Sablons (rose) avec mon ERDE sans que ni l'une ni l'autre n'ait à montrer patte blanche à quelque jésuite en mal de fonction dans la société ? Et qui d'autre qu'un amateur averti pourrait rendre ce service à son prochain sans que cela coûte à ses impôts ? Le seul revenu à en tirer étant celui de son petit commerce, étant entendu que pour réussir dans ce monde-là il faut conquérir la confiance de ses clients...et uniquement !
Donc et surtout rester pointilleux avec ses étiquettes !!!
ERDE en version in-situ...
Je pense en vérité qu'on veut éliminer du marché les "petits" obtenteurs, qui font la grandeur de la profession et l'histoire de l'horticulture, au profit des groupes industriels qui eux ont les moyens de répondre aux conditions abracadabrantes imposées par les organismes certificateurs européens. Pour mes demandes en cours concernant les framboisiers, on me demande des tests vis à vis de certaines entités vivantes microscopiques soit peu actives en cultures, soit même totalement inconnues comme ravageurs sur la plante en question ou pire dont le protocole de détermination n'a encore jamais été mis au point dans les laboratoires de la Protection des Végétaux auquel j'ai posé la question! (*)
Résultat je suis éliminé au départ ou, à moins de confier mes droits à une société spécialisée, j'aurai espoir de voir ma plante un jour commercialisée mais sans jamais retirer bénéfice d'un droit de propriété intellectuelle comme il est naturel pour toute création (ne pas confondre avec la polémique sur la confiscation du vivant) et aussi le dépit de voir cette variété accaparée par des spéculateurs capables de la multiplier à grande vitesse dans un pays tiers dépourvu de droits et dans le but officiel de déstructurer le marché du fruit... à leur profit et non à celui des producteurs d'ici ou d'ailleurs.
(*) Le volet "précaution sanitaire" est l'argument commode et fortement hypocrite pour évacuer la concurrence ou peut-être même l'adversaire! Car enfin tout le monde sait que rien ne peut se réduire à la lutte du bien contre le mal et que scientifiquement les choses sont on ne peut plus compliquées. Le retour à des méthodes de cultures respectueuses et les résultats obtenus prouvent qu'il s'agit bien ici d'une opposition philosophico-politique fondamentale. Et puis il y a les hygiénistes de tous poils qui, pour prétendûment rendre service à leurs compatriotes, les obligent à se plier à des consignes obtuses et sans fondement réalistes, tel le fameux principe de précaution qui, s'il était appliqué dans sa plus stricte observance, rayerait de la planète la majorité de l'humanité !!!!